« Esmeralda, regarde, c’est une fille, c’est Loreleï»
Oui, c’était une petite fille qu’il tenait dans ses bras à ce moment-là. Une frêle et douce petite fille. Yu-jin pourrait se targuer, que dis-je se vanter d’avoir une fille auprès de ses collègues. Elle était menue et fragile la petite princesse, mais elle ne pleurait pas, non, elle dormait, tendrement lovée dans les bras de son père, sous le regard bienveillant de ‘’papi ‘’, le dragon de Yu-jin ainsi affectueusement renommé par les enfants d’Esmé’.
Petite elle était déjà le trésor de son père, la fille de sa mère et qui sait ? Peut-être la pierre précieuse de son grand frère… Fenrisulf.
Un père dragonnier dans les escadrons d’élite, une mère élève à l’école d’Aoun, son village natal, un frère élève aussi, tous les deux assidus et elle, petite merveille avec ses grands yeux prune.
Plus que tout, elle grandissait à vue d’œil, caressant le langage d’une voix douce, sublimant du regard chaque chose passant sous ses yeux. Elle grandissait à vue d’œil alors que les années longues et douces, tendres et finalement équilibrées, une mère, un père, un frère. Que demander de plus ?
Elle grandissait, la douce enfant.
« Elle est en âge d’entrer à l’école ? Tu penses ?»
Oh que oui elle le pensait. Esméralda n’allait pas déroger à cette règle. Elle était entrée à l’école de combat à l’âge de 4 ans, Fenrisulf aussi, alors sa fille entrerait à l’école à 4 ans. La voilà entrant dans cette vieille bâtisse de pierre. Elle est timide, tenant la chemise de son frère sans vouloir la lâcher. Et pourtant, elle n’a pas le choix.
Elle testa toute les voies avant de montrer des prédispositions pour la voie du Faucon, comme sa mère, mais aussi cette du loup, plus que des dispositions, elle était douée, c’était inné..
Plus elle grandissait et plus cela devenait facile. Peut être pas avec tout le monde, mais avec son frère, avec Fenri’, cela devenait facile, c’était comme respirer tellement leur osmose était parfaite. Pas besoin de regard, ni de parole, non, l’un et l’autre se calquaient sur le rythme de son partenaire et leur pas étaient comme une danse, un Tango passionné, enflammé.
Cela a duré ainsi pendant longtemps, de longues années d’entrainement et de rigueur, puis son frère est devenu disciple, protecteur d’Aoun sous la regard émerveillé de sa petite sœur.
Elle, restait élève, apprenait finalement sous son enseignement, plus qu’un coéquipier, il était maintenant un professeur et elle fut heureuse d’apprendre sous son commandement.
Elle était fière, elle se targuait d’avoir comme professeur et allié son frère… Pour elle ce fut son héros pendant des années.
Puis il y a eu Apstim.
« Mon ange, tu deviendras dragonnier, comme ton père »
Non, elle ne voulait pas…
Apstim… Même si elle était jeune, elle se souviendra toujours de sa rencontre avec son ‘’chaton ‘’. Elle était jeune, elle avait dix ans quand elle a rencontré la boule d’écaille.
Elle se baladait avec sa famille dans l’archipel de Wuweishu, Yu-Jin avait eu une permission. Elle était heureuse, jusqu’au moment où elle trébucha sur un caillou. Enfin, ce qu’elle pensait être une pierre.
Son père, curieux ramassait finalement la pierre et sous les suppliques de sa fille, ne put que la ramener chez eux.
Loreleï l’a alors nettoyé et contemplé pendant de nombreux jours, jusqu’au moment ou la pierre fit un drôle de bruit. Elle bougeait, elle se fissurait et finalement, elle fit éclore un Etrange dragon noir qui n’attendit rien pour s’enfuir par la fenêtre ouverte, sous le regard peiné de la jeune demoiselle. Mais ce n’était pas tout, quelle ne fut pas sa surprise de voir un second dragon sortir de l’œuf… Aussi gros qu’un chat, il vint à vaciller vers Loreleï ronronnant. Elle ne put qu’entendre ou penser comprendre un léger ‘’maman‘’.
Depuis ce jour, Apstim ne la quittait plus. Il grandissait à vue d’œil et Loreleï en était plus qu’heureuse. Elle faisait la fierté de son père, elle était aussi douée que son frère pour l’art d’Aoun.
« Et Lindorm ? C’est une école aussi !»
Tout allait bien, ou presque…. Son père voulait qu’elle passe l’alliance et pourtant, elle, elle ne s’en sentait pas capable. Non, elle ne pouvait pas. Elle eut sa première grosse crise.
Puis, son frère partit l’année d’après, laissant un grand vide dans le cœur de la jeune adolescente. Personne ne pouvait la suivre comme il le faisait dans la voie du loup… Personne et le voilà enrôlé dans l’armée alors qu’elle devenait disciple à son tour à seulement dix-sept ans . Elle promettait de protéger Aoun, plus que tout, de protéger sa terre natale : Lostrego.
Alors, comme pour tenir sa promesse, elle passait une première fois l’alliance. Le premier passage fut bien trop simple pour la demoiselle et son dragons de 7 ans, ils avaient l’habitude, de part la voie du loup de combattre ensemble et aucun sang ne coula…
Déprimée par l’échec, elle se lança corps et âme dans l’apprentissage des deux voies qu’elle chérissait. En peu de temps elle devint capable de calquer son rythme sur n’importe quel combattant, ami comme ennemi. Même Apstim.
Elle devenait plus souple, plus agile, son corps se forgeait au combat.
Puis, deux ans après, à l’aube de ses 19 ans, elle vint à retenter l’alliance. Qui fut un second échec, une déception. Elle avait perdu connaissance dans le désert de Firthan…
En colère contre elle-même et sachant qu’elle avait déçu son père, Loreleï tomba dans une profonde dépression, une mélancolie qui la renferma sur elle-même au point de ne plus ouvrir la bouche, de ne plus prononcer un seul mot.
« Et maintenant ? »
Elle resta ainsi prostrée pendant six long mois. Six mois qui lui paraissait des années. Où était Fenri pour la faire rire et sourire ? Il était à la guerre. Où était son père pour lui dire qu’il n’était pas déçu ? Il était à la guerre. Où était sa mère ? Elle était morte d’inquiétude pour sa famille… Seule contre la peur, l’angoisse d’une mauvaise nouvelle.
Alors Esmeralda vint à parler avec le maître de la voie du loup. Elle cherchait conseil, elle cherchait réconfort, elle trouvait le moyen de sortir sa fille de son mutisme. Andarno, Maître actuel vint un jour la voir. Laissant le silence s’installer entre eux il lui fit une offre, un marché… Non, plutôt un chantage.
Soit elle tentait l’alliance une troisième fois malgré le refus catégorique d’Apstim, soit elle devenait son élève, son héritière. Le choix fut vite fait.
Pendant trois ans, elle passait le plus clair de son temps à exploiter et développer son génie dans la maîtrise des voies. Elle prenait de l’assurance, de l’expérience, elle embrassait totalement cette vie, sans pour autant désirer rester enfermée.
Puis une fois ses vingt-trois ans atteints, elle devint maître à la place du sien, elle l'avait dépassé, battu plusieurs fois de suite. Fière de sa disciple, il lui céda officiellement sa place pour la voir briller. Il acceptait même ses caprices, ses désirs de liberté, elle enseignerait oui, elle protégerait Aoun, oui, mais elle serait libre de voyager, de faire découvrir son art dans le monde entier car ce que souhaite cette femme à nouveau souriante ;c’est bel et bien de redonner à l’école d’Aoun sa gloire d’antan. Andarno assurerait l’intérim en son absence.
Elle tente par dessus tout de prouver qu'elle n'est pas un échec pour son nom, son sang et sa famille.