CHAPITRE I : JE SERAI LÀ POUR TOI. La chaleur était pesante. Le soleil, haut dans le ciel, enveloppait le territoire de ses rayons brûlants, réchauffant chaque grain de sables du désert de Firthan. Les pieds nus, la petite fille grimaça. Elle se retenait du mieux qu'elle le pouvait, elle supportait comme ses aînés. Mais les minutes passaient et elle finit par craquer.
«
Tuakana (Mon frère) ! Je veux rentrer au campement, maintenant. »
Ahini posa sur sa petite sœur un regard bienveillant et sourit discrètement. Pour toute réponse, il ferma les yeux et bascula la tête en arrière, écartant très légèrement les bras. Il inspira profondément l'air asphyxiant du désert, comme pour s'imprégner de la lourde atmosphère de sa terre natale.
«
Tu dois faire corps avec ton univers, Neinuma. Ou tu ne seras jamais une vraie Annunaki. Ni un guide digne de ce nom. Et Tipuni (Père) ne sera jamais fier de toi. »
Ses paroles étaient dures. Les yeux de l'enfant la démangeaient soudain ; elle se retint de pleurer. Elle savait qu'elle susciterait aussitôt les moqueries de son aîné. La petite serra les poings et encaissa alors péniblement la douleur infligée par le sable brûlant de Firthan. Et comme pour l'aider, remarquant son attitude brave qui faisait sa fierté et celle des deux autres hommes de la famille, Ahini posa une main sur l'épaule de la gamine, tout en lui chuchotant :
«
Serre les dents. Tammuz t'aidera à supporter ton périple. »
Elle ne comprenait pas vraiment les mots des adultes mais elle hocha la tête, en apprentie silencieuse et disciplinée. Tammuz, elle le vénérait comme ses aînés, en priant pour lui rendre Grâce. Elle récitait par cœur ce que sa mère lui murmurait depuis qu'elle eut l'âge de comprendre, même partiellement. Elle savait également honorer le Feu, elle connaissait les chants de fête et ceux de prières, elle connaissait les danses traditionnelles, bien qu'elle n'ait jamais que cinq ans. C'était souvent à elle que revenait l'honneur de chanter la première. On murmurait chez les Te-Arawa que quand une âme pure ouvrait la marche et émettait les premières notes sacrées, Tammuz tendait l'oreille, touché par l'appel de ses plus jeunes enfants. On fit comprendre à la petite qu'il s'agissait là d'un grand honneur. Et c'est légèrement nerveuse qu'elle entonnait, toujours un peu faussement, les premiers sons des prières.
Et, comme si les mots d'Ahini se gorgèrent de sens, Neinuma ne ressentit presque plus la douleur. Sa peau rôtissait toujours mais elle n'y prêta plus la même attention. Son frère pointa soudain le doigt au loin et s'accroupit pour se faire discret. Il tira gentiment sur la main de la petite fille pour l'enjoindre à faire comme lui. Un murmure s'échappa de sa bouche, que Neinuma eut du mal à entendre tellement le son était bas :
«
Là-bas, petite. Un chanvrat. »
Le jeune homme sourit de toutes ses dents. Aujourd'hui était un jour de chasse et peut-être aurait-il le plaisir de ramener lui-même la proie. Il en vint à se demander si son frère et ses sœurs auraient autant de chance que lui et croiseraient également du gibier. Il n'en doutait pas vraiment, au fond. Deux de ses sœurs étaient d'excellentes traqueuses. Tant mieux. Ils fumeraient et sècheraient la viande, elle serait ainsi plus facile à transporter et ils pourraientt s'alimenter sans peine même lors de leur prochaine migration.
«
Ne t'approche pas trop, Nei. S'il te voit, il te chargera. »
La gamine frissonna. Elle ne put s'empêcher de fixer l'animal colossal. Ses deux grosses cornes pointées en avant, prêtes à empaler le premier ennemi qui croiserait sa route. Les chanvrats étaient connus pour être des voyageurs pacifistes et solitaires. Mais étonnamment intelligents et, de fait, reconnaissant sans peine les chasseurs et leur intention de les tuer. Vulnérables, les chanvrats n'avaient pour eux que leur poids, leur vitesse et leurs cornes. Il suffisait d'être un peu habile pour s'en sortir. Néanmoins certains Roroas, peu vigilants ou encore trop peu formés à l'art difficile de la chasse, périrent contre cette proie. Neinuma déglutit.
«
Je vais y aller en premier, toi, tu restes là. »
Il ne lui serait jamais venu à l'idée de défier l'autorité de son frère. Aussi l'enfant resta accroupie, immobile derrière une dune. Elle entendit les bruits de pas de son aîné et, bientôt, le mugissement énervé de l'animal chassé. Les bruits de ses sabots immenses à moitié éteints par le sable firent cependant vrombir le sol. Neinuma se tassa sur elle-même, espérant que son instinct se trompait : alors qu'il lui disait de fuir, elle n'osait désobéir à son frère.
Mais le sol ne se calma pas et, sans le vouloir, Ahini avait détourné la trajectoire de la proie qui fonçait maintenant à toutes bringues sur la pauvre petite, terrorisée, inoffensive.
C'est à ce moment même qu'un rugissement assourdissant retentit, accompagné aussitôt d'un jet de feu phénoménal. A trente mètres de là, choquée, la gamine observait sans vraiment comprendre. Les flammes crépitèrent à quelques centimètres de son corps recroquevillé. Elle eut un léger sursaut, seul signe apparent de son état émotionnel. Ahini s'était arrêté net dans sa course, la bouche entrouverte et les yeux écarquillé. La peur, sans doute. L'incompréhension peut-être aussi. L'enfant laissa alors rouler des larmes de terreur sur ses joues, silencieusement. Elle fixait aléatoirement le corps rôti du chanvrat et la silhouette gigantesque du monstre qui venait de se poser dans un tremblement de terre qui l'avait littéralement faite sauter du sol. La créature, d'un noir de jais, posa ses yeux blancs sur Neinuma. Une seconde plus tard, la petite arrêta de pleurer et se sentit comme apaisée. La bête darda ensuite un regard meurtrier sur l'aîné et hurla de colère, dans un grondement sourd qui fit remonter les entrailles du garçon jusque dans sa bouche.
«
Faillis une fois encore à ton devoir et menace sa vie … J'en finirai aussitôt avec la tienne. » railla la sombre créature. Pour bien se faire comprendre, il ajouta encore : «
Dans d'atroces souffrances. »
Ahini déglutit difficilement, à peine conscient qu'un dragon venait de surgir devant lui. Un dragon. Devant lui. Une créature énorme, terrifiante, qui avait fait naître en lui un tel sentiment d'effroi qu'il en avait mouillé son pantalon. Honteux, effrayé, le jeune homme ne put que hocher la tête. Alors seulement la créature s'approcha de la petite fille. Sans savoir pourquoi, Neinuma tendit la main et toucha du bout des doigts le museau rugueux du géant noir. Le dragon ferma les yeux un instant et projeta dans son esprit une image emplie de chaleur qu'il renvoya à la petiote. Dans la tête de l'enfant, ces sons retentirent, comme une berceuse :
«
Je serai là pour toi. »
Finalement, le dragon noir s'éloigna doucement et prit son envol, bien décidé à tenir cette promesse.
CHAPITRE II : POUR NE PLUS SE QUITTER.«
Elle est magnifique, Tipuna (Mère).-
Oh, tes sœurs et leurs mères m'ont aussi aidées, tu sais. -
Uleila ? -
Oui, et Teluhana, aussi. Toutes deux ont tenu à participer. Après tout, ce n'est pas tous les jours qu'on ... »
La gorge serrée, la mère de Neinuma ne parvint pas à finir sa phrase. La jeune fille avait grandi tellement vite. Elle n'avait pas vu les années passer. Et, contrairement à certaines des femmes de son mari, elle n'avait pas eu la chance d'enfanter une deuxième fois. Neinuma était tout ce qu'elle avait de plus cher. Mais il était dans l'ordre naturel des choses de la laisser faire. Elle avait également eu très peur pour sa fille quand celle-ci lui avait annoncé vouloir devenir une Annunaki. Ou quand elle l'avait discrètement emmenée avec elle, une nuit, pour lui montrer son secret. Hehua avait failli avoir une crise cardiaque en voyant l'énorme dragon noir, présenté par son enfant sous le nom de Raiwyngharr. Elle se détendit seulement quand elle observa de ses propres yeux la relation intime que le dragon et la jeune femme avaient l'un avec l'autre.
Mère et fille s'entendaient particulièrement bien. Plus les années passaient, plus elles étaient proches. Leur relation évoluait vite et atteignit une profondeur que certaines mères jalouseraient.
Comprenant l'angoisse et la tristesse apparentes de sa génitrice, Neinuma s'approcha et l'enlaça. La demoiselle posa son pouce sur le front de sa mère, traça une ligne invisible le long de son nez pour remonter sur son front et placer deux petits points du bout du doigt perpendiculairement, au-dessus de chaque œil. Hehua sourit. C'était un signe de protection que l'on dessinait sur le front des enfants, souvent avant qu'ils n'aillent se coucher, pour les rassurer. Hehua le faisait souvent à sa fille.
«
Tout se passera bien, Tipuna. Je reviendrai te voir souvent. »
La robe nouvellement cousue tout contre son corps, la jeune demoiselle sourit à sa mère. Cette dernière, désireuse de ne pas laisser ses sentiments la submerger, secoua doucement la tête.
«
Essaie-la, Neinuma. Je suis sûre qu'elle t'ira à ravir. »
Pour l'occasion de ses dix-neuf ans et surtout pour lui porter chance dans sa nouvelle vie, sa mère, deux de ses soeurs et leurs mères respectives lui avaient confectionné une robe magnifique, en cuir de chanvrat tanné. Ajustée à sa taille et mettant en avant sa musculature déjà saillante, la robe couvrait sa poitrine jusqu'au-dessus des genoux, moulant joliment ses formes féminines. Elle était décorée de motifs peints avec cette teinture spéciale échangée aux marchands Pakehas contre des parures d'os de leur confection. Un signe d'ouverture d'esprit qu'on aimait bien afficher, dans la tribu Te-Arawa. Son père affirmait qu'ainsi, les quelques Pakehas qui utilisaient leur aide pour traverser le désert de Firthan voyaient en eux un peuple pacifiste envers leur race. C'était on ne pouvait plus vrai dans le cas de la tribu de Neinuma, fondamentalement favorables aux Pakehas, souhaitant seulement vivre en paix et éventuellement apprendre des Blancs et vis versa. Les Te-Arawa étaient persuadés que les Blancs s'étaient assagis après l'affreuse guerre qui tourmenta leur deux peuples. Et s'ils n'étaient pas dupes et qu'ils se rendaient compte que tous les Pakehas n'étaient pas à mettre dans le même panier, ils savaient aussi voir ceux qui avaient réellement changé leur façon de penser au fil des années.
Neinuma épousait parfaitement les croyances de sa tribu. Comme pour ce qui était du domaine religieux ou culturel. Elle était fière de leur façon de penser et de voir les choses. Fière de l'appréhension que son clan avait de la vie, des autres en général. La différence n'effrayait pas les Te-Arawa. Cependant, son instinct lui avait commandé de garder secrète sa relation avec Raiwyngharr, de peur, sans doute, d'attirer trop l'attention. Aujourd'hui n'était donc pas seulement le jour de son départ ; c'était aussi celui de son aveu. Et, tendue, elle s'apprêtait à présenter son compagnon de vie au reste de sa tribu.
Hehua s'éclipsa, laissant à son enfant le loisir de se préparer seule. Elle devait encore s'habiller et se décorer avant de rejoindre le groupe qui l'attendait impatiemment autour du Feu. Quelques chants commençaient déjà à s'élever et elle sentit l'odeur de la viande grillée qu'ils mangeraient en son honneur. La coutume voulait que l'on salue un départ dans de grandes festivités. Surtout quand il s'agissait de celui d'un prêtre ou d'un guerrier.
« Tu es tendue, constata la voix de Raiwyngharr, chuchotée au creux de l'esprit de la jeune femme.
- Évidemment, répliqua-t-elle, toi non ?
- Pas spécialement. Ils n'ont pas le choix.
- Oui, mais leur bénédiction est importante pour moi. Je ne veux pas devenir Hine-nui-te-pō.
- Ça n'arrivera pas. Ils t'aiment et te respectent. Tu t'inquiètes pour rien.
- Tu as sans doute raison, soupira-t-elle silencieusement. »Elle mit momentanément fin à leur discussion muette pour terminer de se préparer. Une plume de paon du désert vint orner ses cheveux et une autre sa ceinture. Elle prit également soin de faire pendre à son cou un joli collier d'os, finement sculpté. Enfin, sa mère vint la rejoindre et lui décora le visage de teintures d'ocre, dessinant des signes compliqués sur son front et ses joues à l'aide d'une branche sèche, fine et pointue. Elle s'éloigna d'un pas, l'évalua et sourit.
«
Tu es parfaite. »
Neinuma lui sourit en retour. C'était bien là le constat d'une mère. Elle la remercia d'un signe de tête et toutes deux sortirent de la tente pour rejoindre la tribu qui entamait déjà le repas. Fruits cueillis du matin ainsi que séchés accompagnaient la viande grillée, ainsi que des racines et des herbes difficiles à trouver qui constituaient un met de choix. Deux types de viande attendaient dans des plats en terre cuite qu'on les dévorent, signe d'une chasse faste ou d'un moment particulièrement important à fêter. En temps normal, on ne se contentait que d'une seule variété de viande, quand on avait d'ailleurs la chance d'en avoir.
La jeune femme fut accueillie avec enthousiasme et on lui présenta immédiatement de quoi manger. Elle piocha dans tous les plats, comme à son habitude et tenta de faire fi de son angoisse. Raiwyngharr s'incrusta de temps à autres dans son esprit pour l'apaiser comme lui seul savait le faire. Neinuma attendit la fin du repas et les danses qui l'accompagnaient pour enfin se lever et prendre la parole :
«
Mes frères, mes sœurs. Je veux d'abord pour remercier de l'honneur que vous m'avez fait aujourd'hui. Ma vie va prendre un tournant décisif mais j'entends bien revenir faire vous aussi souvent que possible. Je sais que vous êtes impatients de savoir où je m'en vais, exactement. Et c'est pour cette raison qu'il me faut vous présenter ... »
La demoiselle s'arrêta dans son discours et tendit une main vers le ciel qui s'assombrissait de plus en plus. Les yeux des membres de sa tribu suivirent la trajectoire invisible pour se poser sur le ciel à leur tour. Ils virent alors un point noir, au loin, s'agrandir au fur et à mesure qu'il approchait. Bientôt, le point devint une masse et cette dernière se dessina clairement. Un dragon d'un noir pur et profond apparut soudain sous les yeux mi-émerveillés, mi-effrayés de la peuplade. Un murmure de voix s'éleva de chacune des bouches présentes, comme un seul homme. Le dragon se posa et le sol trembla. Énorme, la créature les toisait, presque aussi grosse, à elle seule que tous les membres de la tribu regroupés. Dans un signe pacifique, le reptile ailé baissa la tête, comme s'il s'inclinait. Les Te-Arawa eurent cependant un bref mouvement de recul. Neinuma intervint.
«
N'ayant crainte, mes frères. Voici Raiwyngharr. Mon ami et protecteur. Mon Hoa. »
A l'évocation de ce mot, un second murmure ébranla la petite assemblée. Avait-on idée de nommer Hoa une créature telle qu'un dragon ? Était-ce seulement possible ?
Au tour de l'animal majestueux de prendre la parole. Il utilisa sans aucun mal la langue natale des Roroas, prononçant chaque mot comme s'il était lui-même humain. Sa voix grave et forte résonna dans le désert et vibra en chacun des membres du clan. Un frisson général s'empara d'eux. Raiwyngharr leur expliqua sa rencontre avec la demoiselle, leur raconta leur vie jusqu'à aujourd'hui et les sentiments profonds et étranges qui les liaient tous les deux.
«
Nous souhaitons désormais passer l'Alliance et servir dans l'Armée Territoriale après les années d'études à Lindorm. -
Ceci pour apprendre des Pakehas comme nous le faisons tous les jours, argumenta Neinuma.
Nous voulons connaître leurs techniques de combat, de chasse, afin d'affiner les nôtres. »
Ce fut le père de Neinuma qui prit alors la parole, brisant le silence tendu qui s'était installé.
«
Ma fille, ta voie est noble. Si Tammuz a fait que tu rencontres ce dragon alors tu auras mon soutien. Reviens-nous plus sage qu'aujourd-hui, plus aguerrie. Tu es un élément essentiel aux Annunakû, tes frères et sœurs d'armes en attesteront sans doute. Et tu t'es montrée une guide douée et une marchande sérieuse. Peut-être ton enseignement parmi nous ne t'apportera-t-il plus rien. Va, ma fille. Va t'assagir plus encore. Rapporte à ta tribu le savoir que tu auras acquis et tu feras notre fierté à tous. »
La voix forte du père de Neinuma et sans doute l'intensité de son discours fit vibrer le clan tout entier. De murmures, l'on passa rapidement à des éclats de voix. Et bientôt, les noms des deux Hoas furent scandés et l'on dansa pour les voir réussir et revenir plein de sagesse et de nouveautés.
***
Ensemble, les deux amis et âmes sœurs passèrent l'Alliance. Ils furent envoyer dans les continents flottants d'Aeria et la jeune femme fut tellement envoûtée par les lieux qu'elle se jura d'y revenir dès que possible. Le dragon noir avait ri à de tels propos enfantins et s'était empressé de lui faire remarquer qu'elle avait encore mille endroits à découvrir. Ils réussirent l'Alliance du premier coup, la demoiselle étant une chasseresse et guerrière tout de même depuis plusieurs années. Elle n'avait pas été plus surprise que ça des épreuves qu'on avait mises sur sa route. Certes, elle ne connaissait ni les lieux, ni le climat, ni même les créatures peuplant les îles … mais là où son expérience et sa culture lui faisaient défaut, Raiwyngharr venait combler ses lacunes de ses deux cent ans d'existence. Néanmoins, ce n'est pas parce qu'ils la réussirent du premier coup qu'ils ne furent pas sévèrement mis à l'épreuve. L'Alliance avait amoindri leurs forces et, à la fin de cette dernière, Neinuma était à moitié morte. Au sens propre. Mais conscient du protocole et du déroulement de l'épreuve, Raiwyngharr s'était permis de pousser un hurlement d'avertissement pour le moins terrorisant. Il s'était adressé au vide, de sa voix tonitruante, en assurant que si l'on osait interrompre leur Alliance en envoyant une équipe de secours, il l'anéantirait en moins de dix secondes. Il gérait la situation, qu'on ne s'amusât pas à prétendre le contraire. Et de fait, ils passèrent l'Alliance, bien que la jeune femme eut besoin de soin immédiatement après.
Leur sang fut ainsi échanger, leur lien éprouvé. La jeune femme obtint son Don mais ne découvrit que plus tard en quoi il consistait vraiment.
Neinuma et Raiwyngharr passèrent donc cinq années à Lindorm. La jeune femme découvrit un monde nouveau et le dragon, bien plus vieux et connaisseur qu'elle, lui apprit de ce qu'il savait déjà. Ils eurent cinq années pour apprendre, se faire des amis, vivre, tout simplement. Notre demoiselle fit une scolarité plutôt moyenne, sauf en combat où elle excellait à l'instar du peu de Roroa présent dans les mêmes cours qu'elle.
Après quoi ils passèrent leur diplôme et rejoignirent l'Escadron d’Élite pendant plus de deux ans. Leur vie était entrecoupée de batailles, d'entraînements et de moments où ils retournaient voir leur tribu. Elle fut bien sûr ponctuée de pertes atroces, de rencontres mouvementées et parfois même touchantes. Et de beaucoup, beaucoup de nouvelles connaissances. Telle une éponge, la Roroa absorbait tout ce qu'elle ignorait pour l'emmagasiner du mieux qu'elle le pouvait. Elle adorait apprendre et cette faculté ne la quitta jamais.
***
Enfin on lui proposa de quitter l'Armée Territoriale pour reprendre un poste en particulier à Lindorm. On lui fit transmettre une missive dans laquelle on la sollicitait directement en lui offrant cette opportunité unique. Devenir professeur à Lindorm, là où elle avait elle-même étudié, afin de dispenser son savoir et surtout son efficacité au combat. Former de futures Élites, en somme. Après un temps de réflexion et les encouragements de Raiwyngharr, Neinuma accepta. Ainsi commença-t-elle sa nouvelle année … sous un angle peut-être un peu différent.